Présidentielle 2022 : les droits des personnes LGBTI remis au placard
Comment peut-on mener une campagne présidentielle sans jamais évoquer les droits d’une partie de la population ? Comment est-il possible de ne pas mentionner le sigle LGBTI dans un programme politique à la plus haute fonction de l’État en 2022 ? Les candidates et candidats ont ainsi réussi l’exploit de remettre les droits des personnes lesbiennes, gay, bi·es, trans et intersexes au placard.
Sur les douze candidat‧es, seulement cinq ont des propositions pour lutter contre les LGBTIphobies et pour l’égalité des droits dans leur programme : Anne Hidalgo, Yannick Jadot, Jean-Luc Mélenchon, Philippe Poutou, Fabien Roussel.
Pour les interpeller et connaître leur positionnement sur les sujets LGBTI, SOS homophobie a sollicité tous‧tes les présidentiables à travers 40 questions, portant à la fois sur les moyens, la sensibilisation à la lutte contre le sexisme et LGBTIphobies et les droits des personnes LGBTI. Résultats, seulement trois candidat‧es, soit à peine un quart d’entre elleux, ont daigné nous répondre : Nathalie Arthaud, Yannick Jadot et Jean-Luc Mélenchon. Ce silence en dit long sur la prise en compte des personnes LGBTI dans cette campagne et pour les cinq années à venir.
Ce manque d'intérêt est également ressorti lors du débat organisé, le 21 mars, par l’Inter-LGBT avec des représentant‧es des différents partis. Entre Valérie Pécresse qui n’a pas daigné répondre à l’invitation ou la représentante d’Emmanuel Macron qui s’est bornée à valoriser uniquement des actions passées, les propositions concrètes n’ont pas été nombreuses.
Pas d'engagements sur les moyens
Pour SOS homophobie, la question des moyens financiers et humains aurait dû être au cœur des débats. Sans ces moyens, impossible de lutter contre la haine LGBTIphobe ou sexiste par des campagnes de sensibilisation. Impossible de créer des formations à destination des professionnel‧les. Impossible de créer des postes de formateur‧rices capables de sensibiliser à ces questions. Impossible aussi de renforcer les effectifs déjà engagés dans la lutte contre la haine en ligne
En 2020, SOS homophobie a encore recueilli 1 815 témoignages de personnes victimes de LGBTIphobies. Comment peut-on ne rien proposer pour que ces discriminations et cette haine ne touchent plus personne ?
La lutte contre les discriminations passe également par une égalité devant la loi. Or en 2022, les personnes LGBTI n’ont toujours pas les mêmes droits que les autres citoyen‧nes.
Comment peut-on encore refuser ou ne pas proposer de légiférer sur les mutilations chirurgicales infligées aux enfants intersexes ? Comment refuser de simplifier les démarches de changements de sexe à l’état civil, alors que celles-ci s’apparentent à un parcours semé d’embuches et discriminatoire ? Comment refuser à certaines personnes en capacité de porter un enfant de droit d’avoir accès à la PMA ?
Et que dire quand les LGBTIphobies proviennent directement des candidat‧es ?
Depuis plusieurs mois, les bénévoles de SOS homophobie ont assuré une veille des prises de paroles des candidat‧es afin de relever d’éventuelles propos LGBTIphobes et/ou sexistes. Trois présidentiables n’ont ainsi pas mâché leurs mots voire largement dérapé.
La PMA en tête, rejetée en bloc par les candidat‧es de droite lorsqu’elle est « sans père ». Marine Le Pen considère que « laisser écrire sur un acte d’état civil que l’enfant est né de deux femmes, en réalité c’est un mensonge d’État » sur Brut. Dans la série de podcasts Président‧iel, Élise Goldfarb et Julia Layani interrogent aussi Éric Zemmour sur la PMA et sur la façon dont elles pourront avoir un enfant avec leurs conjointes s’il est élu. Ce à quoi le candidat d’extrême droite répond : « avec un homme vous pouvez faire un enfant ». Rappelons que M. Zemmour souhaite abroger purement et simplement la loi sur la PMA.
L’attaque des associations LGBTI sur leur présence dans les écoles a aussi été un sujet de prédilection pour Éric Zemmour, qui se définit comme un « adversaire de ces groupes LGBT ». SOS homophobie a été une cible directe du candidat, qui lance sur France 2 et RTL que notre association « n’a rien à faire dans les écoles ». Ceci alors que SOS homophobie dispose d’un agrément de l’Éducation nationale depuis de nombreuses années.
De surcroît, la protection des droits des personnes trans reste inexistante dans les programmes. Et certain‧es candidat‧es, à l’instar de Valérie Pécresse, s’adonnent même à la désinformation. La candidate Les Républicains demande au gouvernement « qu’on interdise les opérations de changement de sexe pour les mineurs », pratiques qui n’existent pas en France. Dans le même temps, Mme Pécresse se place en protectrice des droits des enfants, mais se dit contre l’interdiction des mutilations des enfants intersexes. Position qu’elle partage d’ailleurs avec M. Zemmour, quand Mme Le Pen et Nicolas Dupont-Aignan ne cherchent même pas à se prononcer sur la question.
À quelques jours du scrutin, SOS homophobie rappelle que les propos LGBTIphobes ne sont pas des opinions mais bien des délits et que la protection des droits des personnes LGBTI est une question d’égalité. Nos futur‧es représentant‧es doivent impérativement et concrètement s’engager pour une société inclusive.
Lucile Jomat, Présidente de SOS homophobie
David Malazoué, Vice-président de SOS homophobie
Contact : 06 28 32 02 50 / porte-parole@sos-homophobie.org