SOS homophobie appelle à la mobilisation contre la loi «immigration» telle que votée au Sénat, parce qu'elle pourrait aggraver les conditions de vie des personnes migrantes LGBTI et notamment celles vivant avec le VIH
Le 19 décembre 2023, le Sénat a adopté le projet de loi « pour contrôler l'immigration et améliorer l'intégration », dans sa rédaction issue de la commission mixte paritaire. Alors que le Conseil constitutionnel devra se prononcer le 25 janvier sur sa constitutionnalité, SOS homophobie appelle à la mobilisation contre le texte tel qu’il a été voté. En l’état, il aggravera les conditions de vie des personnes migrantes LGBTI et notamment celles vivant avec le VIH, en contradiction avec les principes de liberté, d’égalité et de fraternité.
Le texte voté par le Sénat comprend des mesures qui entraîneront des conséquences gravement préjudiciables sur la vie des personnes LGBTI+ et vivant avec le VIH voulant trouver refuge en France ou demandeuses d’asile.
En premier lieu, le texte risque d’accentuer la précarité des personnes LGBTI en exil en raison des défis particuliers auxquels elles sont déjà exposées. L’expérience a en effet démontré que du fait de leur orientation sexuelle et/ou identité de genre, elles peuvent difficilement compter sur les ressources du réseau de solidarité et d’entraide communautaire de leur pays d’origine pour pallier les insuffisances de l’accueil des étranger·es en France. En durcissant les conditions d’octroi des aides sociales pour l’ensemble des étrangers, la loi immigration prolonge la surprécarité des personnes LGBTI en exil qui ne pourront compter ni sur leur communauté ni sur l’Etat français pour pouvoir vivre dignement.
En deuxième lieu, en abandonnant certaines garanties procédurales telle que la collégialité de la Commission nationale du droit d’asile (CNDA), cette loi expose les personnes en quête d'asile à des risques accrus de refus, en particulier celles fuyant des persécutions liées à leur orientation sexuelle.
SOS homophobie rappelle que l’homosexualité est toujours pénalisée dans plus de 60 pays, ainsi que les transidentités. Pour bénéficier de l’asile en France, les personnes LGBTI victimes de persécutions doivent prouver la réalité de leur orientation sexuelle ; bien trop souvent, cette démonstration repose sur l’idée préconçue que la justice se fait de l’homosexualité. Or, la collégialité oblige justement chaque juge de la CNDA à soumettre ses propres stéréotypes au regard critique d’autres juges et ainsi dépasser ses préjugés pour arriver à une décision plus juste pour les demandeur·es d’asile LGBTI.
En troisième lieu, des dispositions de la loi contribuent à la précarisation des demandeur·es d’asile et, par conséquent, à la surprécarisation des demandeur·es d’asile LGBTI.
SOS homophobie regrette que cette loi n’ait pas été l’occasion de réfléchir de façon sérieuse et rationnelle aux conditions de mise en œuvre du droit d’asile pour les personnes LGBTI.
En quatrième lieu, SOS homophobie s’inquiète des évolutions apportées au titre de séjour pour soins qui a pour conséquence tragique d’exclure du bénéfice d’un titre de séjour pour soins les personnes vivant avec le VIH originaires de pays où les traitements sont simplement et théoriquement disponibles.
Remis en cause par la loi immigration, ce titre de séjour peut actuellement être délivré aux personnes gravement malades, notamment à celles vivant avec le VIH, qui ne pourraient pas bénéficier « effectivement d'un traitement approprié » dans leur pays. À cette condition d’effectivité d’accès au traitement, la loi immigration y substitue la condition de simple disponibilité du traitement. Cette modification a pour conséquence tragique d’exclure du bénéfice d’un titre de séjour pour soins les personnes vivant avec le VIH originaires de pays où les traitements sont simplement et théoriquement disponibles mais inaccessibles en pratique, par exemple en raison de discriminations liées à l’orientation sexuelle ou d'un prix trop élevé.
Enfin, l'instauration de quotas migratoires, dont le principe même est contraire à nos idéaux, inquiète également notre association dès lors que feront l'objet d'un débat le nombre de personnes admises à pouvoir bénéficier d'un titre de séjour pour soins en France.
Cette loi risque ainsi de condamner des étranger·es à vivre dans la maladie, la clandestinité et le risque constant d’être condamnés pénalement pour le délit de séjour irrégulier en France rétabli par le Sénat. L’adoption de ces dispositions ne peut que questionner sur l’engagement réel de l'État dans la lutte mondiale contre le sida et pour le respect du droit à la vie et à la santé.
À l’heure où montent les discours politiques mettant en péril les droits à l'égalité et à la dignité des minorités, SOS homophobie rappelle l'importance de s'intéresser aux questions intersectionnelles touchant à l'orientation sexuelle, à l'identité de genre, aux identités culturelles et aux parcours migratoires.
Dans ce contexte, elle appelle à la mobilisation partout en France le 21 janvier pour exiger la modification du texte et défendre les droits fondamentaux qu’il menace.
Contact presse : Joël Deumier (0615276409) et Véronique Godet (0789211480) co-Présdient•es de SOS homophobie